Ironman 70.3 Mont-Tremblant

Photo: Jean-Christophe Lagacé, Équipe Merrell-Garneau

Ce qui devait arriver arriva.

Je me suis présenté au départ de cette première vraie compétition de la saison avec une forme très moyenne mais tout de même très motivé.

Ça m'a permis de survivre en un temps de 4h40, après une nage que je croyais plus rapide, un vélo tel qu'attendu et une course à pied dans laquelle je me demandais qu'est-ce que je faisais-là...

Ce genre de question n'est jamais bienvenue en compétition, mais ça s'est replacé au fil des 21 km. 

Comme dirait le modèle pour publicités de shampoings, Victor Larocque: «Pffff, un autre de complété...»

La saison est longue, tout se replacera. Peut-être finirai-je l'année en forme contrairement à d'habitude? C'est peut-être juste ça!

Bref, mes performances ne sont pas passées à l'histoire cette fin de semaine.

Ce qui faisait jaser, c'est surtout les amateurs super rapides qui, selon plusieurs, devraient courir chez les pros.

Évidement, le problème en triathlon, c'est qu'il n'y a rien entre le plus haut niveau et la randonnée populaire.

Si on se parle en Québécois, c'est comme demander à un jeune hockeyeur talentueux dans le junior majeur de jouer sur le 1er trio dans la NHL du jour au lendemain.

Et ça, c'est au hockey. 

Dans un sport où il faut s'entraîner, c'est encore plus difficile.

Alors plusieurs trouvent révoltant que les rares québécois qui courent pro ont moins de soutient matériel et financier que plusieurs amateurs qui vont plus vite qu'eux.

C'est un bon débat. Tous semblent espérer qu'une catégorie du genre élite verra le jour. C'est effectivement ce qui manque.

Mais en attendant, chacun connaît les règles du jeu. 

Plusieurs athlètes québécois de pointe sont chez les amateurs cette année, préparant sans doute un grand coup pour les championnats du monde qui auront lieu chez eux en septembre.

Je ne vois pas ce qu'il y a d'anormal là dedans.

S'ils veulent courir pro un jour, c'est l'occasion rêvée de se montrer, en espérant que quelqu'un avec des $$$ les trouve bon et cool.

Voilà donc une stratégie beaucoup plus intéressante que de courir pro et bouder. 

Ou juste bouder.

Il y a aussi cet esprit de «champion de ma rue» qui règne. 

Rien de nouveau ici. 

Je me souviens, il n'y a pas si longtemps, des cyclistes qui voulaient interdire les pros aux mardis cyclistes de Lachine parce que la course était trop dure.

Autrefois, moi et mes chums de l'équipe élite EVA-Devinci étions bannis des courses cyclistes dans notre propre région, le Saguenay-Lac-Saint-Jean, parce que notre présence décourageait ceux qui débutaient dans le sport.

Voilà encore la même histoire qui se répète.

Le dicton «à vaincre sans péril, on triomphe sans gloire» semble être étranger à plusieurs.

Les gens ont tendance à préférer être le meilleur des pas bons que le moins bon des bons.

Cette dernière phrase est mêlante, mais en gros, nous avons la rare chance d'être sur le même départ que les meilleurs athlètes de notre âge, certains ne sont là seulement que pour cette année, et tout ce qu'on entend, c'est:

«Ah ils sont tous dans les Age group et nuisent à mes chances de me qualifier pour les championnats du monde!»

Et bien justement, le mot le dit: Championnat du monde. C'est pour les meilleurs de la planète, dans quelconque domaine.

C'est certain que c'est une belle expérience d'être au départ, mais il faut avouer une chose: se qualifier ne doit pas devenir, dans notre tête, quelque chose de difficile. C'est extrêmement difficile (et circonstanciel), même pour les meilleurs.

Le point positif dans cette histoire, c'est qu'en septembre, ceux qui n'ont jamais vu un championnat du monde réaliseront que l'élite mondiale des groupes d'âges est essentiellement composée d'athlètes commandités, qui s'entraînent presque à temps plein et qui battent les pros les plus faibles plus souvent qu'autrement.

C'est ça la game. Il n'y a rien d'anormal dans ce qui se passe au Québec.

Et tant qu'il n'y aura pas de catégorie élite, je ne vois que ce qu'un Québécois qui fait en haut de 4h sur 70.3 ou 9h sur Ironman fait chez les pros, à moins qu'il n'en retire une satisfaction personnelle, ce qui est tout à fait honorable.

De mon côté, je ne me sens pas visé, surtout pas avec mes performances actuelles! Par contre, je peux dire qu'une fois que ces athlètes seront pros, je vais m'ennuyer de ces moments où j'étais sur la même vague de départ qu'eux, à pouvoir espérer leur faire la course. C'est arrivé par le passé et c'était assez trippant!

Je trouve toutefois excessivement dommage que la critique retombe presque essentiellement sur mon équipe, le premier beau projet de regroupement de triathlètes d'élite au Québec.

Une équipe financée par des entreprises qui croient dans le développement de ce sport, autant par la performance que par la participation, tout cela en ayant une éthique et une image alliant plaisir et résultats.

Cette équipe a pour but de supporter les jeunes talents de la province, filles et gars, dans leur progression et leur transition vers la catégorie professionnelle. 

Ceux qui sont dans le sport depuis moins longtemps et qui ont l'attitude recherchée par les partenaires ont aussi le soutient nécessaire pour se développer.

Le but à long terme est de créer une première vraie génération de pros québécois qui pourront se consacrer à la compétition à temps plein.

Rendu là, il est fort probable que je ne serai plus dans le décor mais pour l'instant, je suis très fier de faire partie de cette aventure.

Plusieurs continueront probablement de critiquer et de cracher sur tout ce que l'on fait. Peut-être réaliseront-ils un jour que c'est justement pour cette raison que personne ne les encourage.

Bon, assez.

La saison se poursuit dès dimanche, au triathlon d'Amqui. Une compétition à seulement trois heures de la maison, c'est rare cette saison. 

Ensuite, l'entraînement reprendra pour 3 bonnes semaines, durant lesquelles je tenterai de prendre une bonne coche de forme. Espérons qu'il n'y ait pas trop d'imprévus...

Le but est d'arriver top shape au 70.3 de Calgary le 27 juillet, ma dernière chance de me qualifier pour ces fameux championnats du monde qui auront lieu au Québec.

Si j'y parviens, je pourrais m'en vanter jusqu'au 7 septembre, jour où je me ferais probablement mettre la volée de ma vie devant toute ma famille et mes amis, en coursant contre des machines de guerre européennes, américaines et australiennes qui ne sauront même pas que j'existe.

J'aimerais bien que ça m'arrive encore!

Commentaires

Samuel Richer a dit…
Salut David,

Propos extrêmement juste, je seconde à 100%.

Bonne chance pour Calgary!

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