Ironman 70.3 World Championship

Photo: Martin Lacasse
Avec les années, on vit de très bonnes et de très mauvaises journées de sport, autant à l'entraînement qu'en compétition.

Et les années filent.

On manifeste une joie certaine ou une certaine déception sur le coup, mais il faut passer par dessus et tout remettre en perspective.

Dimanche matin, je me suis présenté au départ de mon premier championnat du monde à vie.

Hyper motivé, prêt à tout démolir.

Je m'étais dit que j'avais attendu toutes ces années, que je surprendrais bien des gens ce matin-là. Qu'ils n'en reviendraient pas comment j'allais me surpasser et, sans mâcher mes mots, réussir un esti de temps. C'était clair comme ça dans ma tête.

En plus, il mouillait à boire debout. Même pas de chaleur pour cette course dans le désert! Un bonus pour moi, gars du grand Nord.

J'ai vécu de bonnes émotions avant d'entrer dans l'eau, j'étais super content d'être là, avec la plupart des meilleurs de mon âge sur cette planète.

Mais je restais concentré. J'allais perdre beaucoup de temps à la nage. Je voulais garder une bonne technique, faire une solide natation malgré un manque d'entraînement dû à cet accident de vélo qui m'a tordu l'épaule il y a 5 semaines.

Dans ma tête, rien ne pouvait m'arrêter.

Finalement, je sors de ce lac aux allures de soupe (boeuf et orge) en 37 minutes. Ayoye, ça part mal.

Après avoir pris mon vélo, je cours dans la zone de transition, précédé et suivi de quelques athlètes qui courent vers le bike-in.

Des spectateurs étrangers semblent encourager l'un de mes compagnons dans une langue inconnue.

Ils disent: Lastachou!! Lastachou!!

Vite de même, je pense que ça veut dire Enweille le gros, continue comme ça, un truc du genre.

Jusqu'à ce que, 1 minute plus tard, au moment d'embarquer sur le vélo, un participant me dise, dans un anglais très clair: Hey man, you LOST A SHOE!!!

Ah ben...&?*&$&$%!?%&*!?&$

Je laisse donc mon vélo sur le côté et cours à l'envers comme un épais.

Ma chaussure, déjà attachée aux pédales, s'est détachée dès que j'ai pris mon vélo. Mon support à vélo est dans la deuxième rangée la plus loin de la sortie de la zone de transition.

Je vous laisse imaginer la scène... J'ai tout fait pour qu'aucune niaiserie ne survienne cette semaine, et voilà la loi de Murphy qui revient!

Pourtant, elles étaient bien clippées, ces chaussures, il me semble. J'avais pris le temps de bien vérifier.

J'ai donc 10-12 minutes de retard sur les meneurs, en plus d'un lastachou, je suis 52e sur 60 participants, mais il ne faut pas se décourager. L'arrivée est loin.

Le 90 km de vélo va tout régler, comme d'habitude.

Mais non, pas cette fois.

J'ai pourtant eu l'impression d'attaquer fort, de rouler vite, mais le compteur indiquait autre chose et je m'en sors avec mon pire temps sur 70.3 à vie.

C'est 10 minutes plus lent que mon deuxième pire temps, sans que le parcours soit vraiment plus dur.

Bref, il faut le dire, je n'avance pas!

Cet été, plusieurs m'ont dit que le vélo en triathlon, c'était facile pour moi. J'essayais d'expliquer que non, que c'était tout un effort que je faisais, qu'on ne roule pas à 39,5 km/h au 70.3 Mont-Tremblant en claquant des doigts.

Maintenant, ces gens doivent comprendre que je ne suis pas un magicien. Je suis collé à la route.

Dans ma tête, il me reste toujours l'espoir de bien courir le demi-marathon. Anything is possible, qu'ils disent.

Mais non, pas cette fois.

Après un kilomètre, je suis à 5min/km. Le soleil est sorti. Il fait beau, il fait chaud, sortez vos maillots, comme dirait Guylaine Gagnon.

La chaleur n'est pas le problème.

Je cours carré.

J'essaie de me ressaisir, de renverser la vapeur, de visualiser les journées où je courrais bien, quand je flottais sur l'asphalte, quand je descendais le Mont-Bellevue avec une allure de cerf de Virginie.

Mais rien n'y fais. Aujourd'hui. Je descendrais le Mont-Bellevue avec une allure de bonhomme Lego.

Je cours à 5min30-6min/km après quelques kilomètres seulement. C'est moins vite qu'au Ironman de Mont-Tremblant, comme au vélo et à la nage d'ailleurs!!

Je suis gêné d'être là.

Bon, il n'y a rien à faire. Aujourd'hui, je suis un finisher. Je finis 40e de ma catégorie, tout juste parmi les 1000 premiers au total.

Cette course a été à l'image de ma saison. Très compliquée mais je n'ai pas lâché le morceau. Toute cette aventure va payer plus tard, j'en suis certain.

En début d'année, je m'étais bien sûr fixé Hawaii comme objectif, mais je m'étais aussi dit que cette saison serait réussie si j'atteignais le championnat du monde sur une des deux distances Ironman.

C'est donc mission accomplie.

Il est certain que j'aurais espéré livrer une performance au moins semblable à la normale. C'est quand même mon pire temps sur demi-Ironman  par 25 minutes. Ce n'est pas vrai qu'on vient ici juste pour finir en courant un demi-marathon en 2 heures, mais aujourd'hui c'était comme ça et c'est tout.

Pas d'excuses, pas de remords, pas de si j'avais, pas de peine.

Je laisse tout ça aux sportifs qui passent à côté de tout ce qu'ils ont en pensant toujours à ce qu'ils auraient pu avoir dans un monde idéal. Il y en a de plus en plus et ils m'énervent.

Contrairement à la fin de ma saison 2012, je peux dresser une liste presque interminable de choses que je peux améliorer. Ça, c'est toujours une bonne nouvelle. La motivation sera donc au rendez-vous cet hiver, je le sais déjà!

Avant tout, je dois laisser du temps à mon épaule pour guérir. Ça se déroule bien, mais maintenant elle aura du vrai repos. Tout le repos qu'il faudra.

C'était une superbe semaine, je suis en santé, je commence une nouvelle job la semaine prochaine et surtout, je ne suis pas en train de traverser Terre-Neuve en Bicycle.

Je suis à la bonne place.

La vie est belle.

On rentre au pays demain.

Bon automne et merci de votre support.

Commentaires

Anonyme a dit…
Ben moi j'te trouve très bon d'avoir tout enduré ça dant ta saison. Ça prend de la résilience et de la grosse motivation. Repose-toi enfin et comme d'habitude tu auras certainement d'autres objectifs de fixés d'ici là. Ta couze Isabelle xxx
Anonyme a dit…
erreur de débutant, attache tes souliers avec des élastiques
Mona a dit…
Ah! J'avais hâte de tout savoir (comme d'habitude!!).
J'ai trouvé ton article ''drôle'' malgré tout. On peut dire que tu écris très bien. Ça, personne ne peut te l'enlever et tu es 1er la-dedans..Je te voyais avec ton soulier perdu etc.. La vie (ta vie) n'est pas finie et comme tu dis si bien tu as plein plein de nouveaux projets et la prochaine fois sera sûrement la bonne!! Tu es très motivé ++ et l'important, c'est de ne pas lâcher et de persister. Tourelou xx
Isa a dit…
«Je laisse tout ça aux sportifs qui passent à côté de tout ce qu'ils ont en pensant toujours à ce qu'ils auraient pu avoir dans un monde idéal. Il y en a de plus en plus et ils m'énervent.» J'adore, tout simplement. Tellement vrai! J'adore aussi la fin: «Je suis en santé!» Au final, c'est ce qui compte vraiment. Bravo!
Unknown a dit…
L'important, c'est le voyage...
Chu pas mal dans la même galère depuis un petit bout et ce texte m'a inspiré...
Thanks...

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